jeudi 24 octobre 2013

Diplômée, proclamée

En août 2013, quand on me demandait ce que je faisais dans la vie, je répondais inlassablement que j'étais étudiante. 

Alors en quoi ? En logopédie. 

Alors où ? A Bruxelles. 

Alors combien de temps il te reste ? Eh eh... plus beaucoup. Oui car depuis le 2 septembre 2013 (jour de ma soutenance de mémoire, un grand moment cestmoiquivousldis), je ne suis plus étudiante mais... logopède (orthophoniste pour les Français de France). Mes yeux brillent.

Un mois plus tard, en septembre 2013, quand on me demandait ce que je faisais dans la vie, je répondais de novo que j'étais logopède. Pardon, que je suis logopède et que je serai.

Et à Bruxelles, notamment dans les facs belges, il y a une cérémonie de remise des diplômes. Une VRAIE cérémonie. Où ya ta famille, tes amis. Où ya tous tes homologues étudiants. Où tu vas voir tes cinq années d'études défiler et où tu quittes officiellement ce monde estudiantin.

La vraie cérémonie donc a eu lieu le 11 octobre 2013, date que je ne suis pas prête d'oublier. J'étais convoquée avec tous mes nouveaux collègues (!) à 15h dans les coulisses d'un grand auditoire belge. Dans une petite salle, on dépose notre carte d'identité en échange d'une toge bleue et noire (couleur de ma faculté, la psychologie) et d'un mortier (le fameux chapeau des diplômés américains, sauf qu'on est en Belgique. Dingue.). On passe aux essayages, on calcule la pose exacte du mortier pour ne pas qu'il tombe et personnellement je me dis que la taille unique de la toge n'est pas vraiment un cadeau pour moi. Trop grande ! J'ai l'air de Mickey dans Fantasia qui tente de garder en ordre les balais dansants... Bref.


Tout fiers mais un peu fébriles, nous nous sommes placés devant les portes de l'auditoire, haut lieu en émotions pour ce jour-là. 

Au passage, cet auditoire nous a déjà vu nous asseoir sur ses bancs mais pour une toute autre raison : un examen. Et particulièrement foiré de manière générale ! Bref. Et puis cet auditoire fait partie d'un complexe avec d'autres auditoires, trônant juste en face du bâtiment dans lequel, cinq ans auparavant, on a fait la file mes parents et moi pour m'inscrire dans cette faculté. 
Bâtiment de remise des diplômes VS bâtiment des inscriptions, la boucle est bouclée comme dirait l'autre.

Oui donc on attend tous en rang d'oignon, répertoriés par spécialités (psychologues, psychologues du travail, éducateurs, neuropsychologues, logopèdes, etc.) et le temps paraît un peu long. Nous sommes environ 350. Au même moment, l'auditoire se remplit. D'abord les profs, en toge bleue eux-aussi, prennent place sur la scène, puis nos proches qui s'installent dans les gradins. On guette à travers les trous des portes si on les voit. Je les vois. Je vois mes parents et Antoine de très loin, c'est bon, ils sont là, les festivités vont pouvoir commencer... on entrouvre les portes pour mieux voir et ma mère pense me distinguer de loin mais je comprends dans son geste de coucou-de-la-main qu'elle pense me reconnaître mais que finalement elle pense que ce n'est pas moi et que ah peut-être si c'est moi. Mon père a le nez dans l'appareil photo. Je n'arrive pas à voir ce que fait Antoine. Les portes se ferment. Brrrrr.

L'auditoire est séparé en trois grosses parties, une travée centrale et deux plus petites de chaque côté. Nos proches sont sur les côtés, la centrale nous est réservée.

Il est 17h. On nous demande de nous taire, de nous ranger deux par deux le long du mur et d'avancer en silence. La file démarre et on s'approche tout doucement de la porte d'entrée pour arriver par le haut de l'auditoire. On doit descendre tout en bas pour remplir d'abord les premiers rangs jusqu'au dernier en haut. De la musique est diffusée, c'est Pachelbel, le Canon, un de mes morceaux classique préféré. Mes yeux recommencent à briller. J'avance, la musique est plus forte et j'entends par dessus des applaudissements. Mais... c'est quoi ? Je me sens déguisée dans ce costume trop grand. 

J'arrive tout en haut et je vois des parents, des amis, camescopes/appareils photos/portables/etc. braqués sur nous, le sourire niait, nous aussi, la larme à l’œil, nous aussi. On descend les marches, je ne sais pas où mettre mes bras tellement les manches sont longues et larges. On descend encore et je tourne à gauche pour inaugurer une nouvelle rangée. Je vais jusqu'au bout et je tombe nez-à-nez avec mes parents, placés sur la travée de gauche. Antoine est un peu plus loin, ils n'ont pas pu se placer ensemble. Je vois mes parents contents comme jamais et les yeux de ma mère bien humides. Je serre un peu beaucoup les dents pour ne pas pleurer (même si intérieurement c'est un peu la tempête émotionnelle - joie ? nostalgie ? fierté ? tout en même temps) et on prend le relais des applaudissements pour accueillir tous les autres futurs diplômés qui descendent à leur tour après nous.

Voilà. La travée centrale est remplie à ras bord. Nos mortiers se tournent dans tous les sens pour se rendre compte que tout le monde est là. La cérémonie peut commencer !

Sur la scène, à gauche, sont assis la plupart de nos profs. Leurs chaises sont positionnées de profil pour qu'ils regardent vers la droite de la scène, c'est-à-dire en direction de la chaire de l'orateur. Chaque doyen de chaque section de psycho vont défiler, prononcer un blabla puis appeler chaque étudiant, un par un, avec sa photo projetée en très grand sur l'écran. Nous devrons donc traverser la scène devant tout le monde et nous présenter devant deux autorités académiques : le doyen de la faculté (en toge bleue comme nous) et la vice-rectrice de l'université (en toge orange et noir), leur serrer la main, recevoir un diplôme bleu provisoire. Grands sourires.

Revenons en arrière. Le doyen vient de terminer son discours d'accueil, il invite les logopèdes à se lever, à descendre et à nous ranger à droite de la scène. Par ordre croissant des notes. Les tronches en premier et les boulets en dernier. Je me place donc parmi les dix derniers. Je me sens bien, j'ai envie de traverser cette scène et de mettre fin à toutes ces années, de tourner la page, voire de terminer un chapitre. Non. Un livre et d'en commencer un autre. Pendant que je me perds dans mes pensées, mes camarades sont appelés, je les vois de dos s'éloigner, recevoir leur papier bleu et se placer de l'autre côté de la scène. Dans la file, certaines craignent de ne pas être sur la liste, une autre fond en larmes d'émotion.



Quelqu'un tapote sur mon épaule droite, la secrétaire me fait signe d'avancer et me dit que je serai proclamée dans peu de temps. Mais... déjà ? Je ne suis pas dans les dix derniers ? Bon. Plus que cinq places. Quatre. Trois. Deux. Une, mon nom est affiché, proclamé ! Je sautille par dessus les deux petites marches pour accéder à la scène, dérape un peu, salue ma doyenne [qui était aussi ma directrice de mémoire] et me dirige d'un pas plutôt décidé vers les deux autorités.

A vrai dire, c'était un peu le vide complet dans mon esprit et je n'ai pas de souvenirs de ce moment-là, je n'entendais pas les applaudissements de la salle, n'ai pas regardé ma photo, ni m'être sentie totalement flottante dans ma toge pourtant trop grande.

Je serre les mains, prends mon papier bleu, je me retourne entre les deux autorités puis nous sommes pris en photo par la photographe officielle.




Voilà. C'est fait. Je descends de la scène et me place derrière mes collègues sur le côté gauche. J'arrive dans les gradins à la hauteur d'Antoine, salut émouvant. Quelques minutes plus tard, toute la promo est proclamée, plus qu'à se rassembler sur la scène pour la photo de groupe !

On retourne à notre place dans la travée centrale. Et tous contents. Les autres sections sont appelées, les  pédagogues et les psychologues, de la même manière que nous, un par un, la photo individuelle et de groupe. Tous regagnent solennellement sa place dans l'auditoire.




Il est maintenant 19h. Je crois que le temps n'a jamais passé aussi vite par l'intensité de ces moments ! La cérémonie touche à sa fin. Le doyen nous demande à nouveau de nous lever et d'applaudir vivement nos proches. Ne pas pleurer ne pas pleurer ne pas pleurer.

La délégué de toute la promo s'avance ensuite sur scène pour prononcer un petit discours plein d'anecdotes et de petits souvenirs communs. Elle nous a replongés cinq ans plus tôt en évoquant diverses scènes de la vie estudiantine, le cauchemar de certains cours et des événements drôles qui nous ont tous marqués. 
Cinq petites minutes pour résumer cinq années d'étude !

Pour terminer, on chante le "chant du semeur". Que personne ne connaît... à part les profs et les autorités ! On nous invite à l'entonner, paroles projetées sur l'écran et... a capella. Ahem. Peu connaissaient la mélodie, tout ça a donné une joyeuse cacophonie ! Pas grave.

Et le moment mythique : le lancer de mortier ! Trois (la photographe se place au milieu de la scène face à nous), deux (elle arme son appareil, on pose la main sur le bord de notre mortier), un ! On lance en l'air notre mortier (CLIC la photo est prise) et on se baisse pour le ramasser.

Derniers applaudissements collectifs, chacun retrouve ses proches, les profs quittent leur toge et nous gardons la nôtre encore un peu. Direction le hall de l'auditoire pour un dring d'au-revoir pour les études et de bienvenue pour une nouvelle vie !








Et voilà comment à l'Université Libre de Bruxelles

les étudiants sont diplômés et surtout proclamé !








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